Quelle personnalité attachante possède Seth, tout en délicatesse, sensibilité, émotivité et intuition. C'est un cœur tendre doté d'une grande timidité, qui tend à faire disparaître son ego au profit des autres. Imaginatif, ses rêveries sont à la hauteur de son imagination et vont dans le sens de l'altruisme, de l'innovation et de l'utopie. Mais entre les phantasmes et la réalité, il y a un fossé que Seth n'est pas toujours capable de franchir et c'est alors qu'il passera en mode passif, nonchalant, voire paresseux, certes coopératif, mais relativement dépendant des autres. Attention également que, face aux dures réalités de la vie, il ne se réfugie pas dans les paradis artificiels et dans des rêves éveillés où il se fourvoiera en croyant qu'il est heureux... Une telle âme généreuse est rare, aussi est-il apprécié pour sa disponibilité, sa serviabilité et son sens de l'amitié. Cet enfant est un être délicat qu'il faut entourer d'affection, mais également stimuler et encourager. Ses bulletins scolaires auraient pu être ponctués de « dans la lune » ou « distrait » s'il avait eu l'occasion d'y rester... Il est parfois nécessaire de le faire revenir sur terre, voir vital lorsqu'il ne réalise pas que rester dans un endroit isolé peut lui coûter beaucoup. Son pouvoir émotionnel serait moins abstrait s'il se réalisait au travers d'un violon d'Ingres créatif, comme la musique par exemple, cependant il n'y a guère le temps pour cela à Cloverfield. A la place, il s’épanouit entièrement dans des activités de groupe qui comblent ses aspirations fraternelles, son sens de la solidarité et son besoin cruel de tendresse et d'affection. Il donnera toujours le maximum de lui-même pour quiconque aurait la gentillesse - ou l'intelligence - de bien se comporter envers lui. Hors du groupe affectif, il est comme un poisson hors de l'eau et il va sans dire qu'il voue à ses supérieurs une dévotion toute tendre teintée de respect pour ceux qui, à ses yeux, les protège des monstres. Lorsque le jeune Seth s'entiche de quelqu'un, il faut espérer que cette personne aura pour lui une patience d'ange, car elle n'aura de cesse de voir derrière elle un petit bonhomme le suivre en trottinant tel un poussin suivant sa mère, guettant le plus petit signe d'attention positive ou le plus petit geste tendre qu'on pourrait lui prodiguer.

Les souvenirs sont une chose aussi étrange qu'immatérielle, au même titre que les émotions et le passé. Si vous demandiez à la plupart des gens quel a été leur tout premier souvenir, ils seront bien en peine de vous répondre, car en vérité il est plus que rare que la populace se soucie de ce genre de chose sans réelle importance. Oui, mais voilà, notre petit protagoniste s'en soucie lui, aussi c'est sans difficulté que nous pouvons retracer son histoire. Originaire d'un modeste quartier londonien, Seth est né et a grandit dans le petit appartement de ses parents, monsieur n'ayant pas laissé le temps à sa pauvre mère de se rendre à l'hôpital ni même d'appeler la sage-femme à temps. Ce petit être était né d'une mère couturière qui possédait une certaine beauté et d'un père militaire dans l'aviation qui ne manquait pas d'un certain panache, mais également de beaucoup de courage. Le premier souvenir du garçon était celui de sa mère chantonnant une comptine tandis qu'elle cousait sur sa table de travail, lui l'écoutant et jouant sagement à deux pas de ses pieds, ses boucles blondes encadrant son visage de chérubin. Les journées passèrent ainsi, le petit se passionnant pour tout ce qui était brillant ou coloré, sa mère devant régulièrement lui retirer les boites à boutons des mains. Son père était souvent absent de la maison, Seth ignorant que loin là-bas, au-delà de la mer ourdissait une terrible menace sous la forme d'une croix noire sur un fond blanc et rouge, un symbole qui marquerait à vie le monde entier. L'école ne vit jamais l'arrivée du petit garçon qui grandit dans les jupes de sa mère, apprenant à marcher, parler, mais aussi compter et écrire auprès d'elle durant les toutes premières années de sa jeune vie, lisant difficilement les lettres que son père leur envoyait et écoutant à la radio ce qui se disait sur un bonhomme moustachu qui parlait trop fort et semblait toujours en colère. Cependant le monde était bien plus sombre et cruel que l'idée que l'on pouvait en avoir lorsque l'on avait seulement cinq ans et les rires et les jeux laissèrent bien vite place à l'angoisse et à l'inquiétude croissante qui allait de pair avec celle de tous les Londoniens. Ce père qui n'était guère plus qu'un homme tendre passant régulièrement quelques weekends à la maison disparu de son existence durant une sinistre et fatidique journée, alors que son avion était abattu au-dessus de la Manche en accomplissant son devoir afin de protéger le pays. God save the King.

C'est juste avant ce malheur que les premiers bombardements avaient commencés et qu'on décida d'envoyer des milliers d'enfants le plus loin possible des villes à la campagne, dans des maisons privées pour les plus riches et les plus chanceux, dans des orphelinats pour ceux qui ne pouvaient pas trouver mieux. Seth était issu d'un milieu plus que modeste et c'est loin de la guerre qu'on l'envoya, dans un établissement appelé Cloverfield et qui était censé lui apporter la sécurité et combler ses besoins les plus élémentaires. Il était à peine âgé de 5 ans lorsqu'il passa les portes de l'orphelinat avec en tout et pour tout une petite valisette et un lapin en peluche qui commençait déjà à s'élimer. On l'installa aussi confortablement que cela était possible, puis ce furent le début des véritables ennuis pour lui. Si avec sa mère il pouvait se permettre de faire un peu comme il l'entendait et selon son planning de travail à elle, ici ce fut une autre paire de manches car il y avait des règles à respecter. L'un des points positifs fut qu'un des "grands" - comprenez l'un des plus âgés parmi les enfants, en tout cas pour lui - s'occupa de l'aider à combler ses lacunes au niveau de la lecture et de l'écriture, le faisant de ce fait apprécier ce garçon. Le personnel de l'établissement se révéla bien vite quelque peu... étrange et nombre d'enfants souffraient de maux plus ou moins prenants. Les repas n'avaient pas toujours été d'une très grande qualité, cependant dès le début de l'année 1941, Seth et une poignée d'autres enfants constatèrent des changements dans leurs repas au niveau du goût, sans qu'ils ne sachent pourquoi. Le petit bonhomme n'osait pas en parler, persuadé qu'il se faisait des idées, cependant il diminua énormément sa consommation, notamment celle de la soupe qui lui semblait vraiment mauvaise et ne valait pas celle de sa maman. Ceux qui persistaient à manger en quantité tombaient malades à en mourir au bout d'un certain temps tandis que le garçon et quelques autres s'en tiraient avec des maux de ventre et de tête, des vomissements et des évanouissements, personne ne parvenant à échapper vraiment à ce fléau. D'autres encore eurent quelques accidents, leur avait-on dit, au point de s'être cassés des os, mais rapidement cela prit une ampleur similaire à celle des malades, au point que personne ne comprenait plus rien. Le garçon commença à se douter de la cause réelle de ces maux, mais comme il écoutait toujours ses ainés qui affirmaient qu'ici on prenait soin d'eux, il ne dit jamais rien tel un petit poussin qui ne demandait qu'à être sage malgré la fragilité de leur état à tous. En un mois pourtant, tout changea brusquement et ce fut le début de l'angoisse, la vraie. Les adultes avaient disparus et personne ne savait s'ils les avaient abandonnés à leur sort ou s'ils avaient été tués, bien qu'en ce cas ils auraient du retrouver leurs cadavres quelque part. Certains allèrent attendre chaque jour qui passait un éventuel bus pour les ramener vers les villes, en vain, jamais personne ne vint tandis que chacun se remettait de leur étrange maladie, pour ceux qui avaient survécus. Puis lorsque les plus téméraires décrétèrent qu'ils iraient à pied, on eut la mauvaise surprise de les voir revenir un peu plus tard dans la journée, racontant à qui voulait l'entendre qu'ils étaient prisonniers et qu'ils ne pouvaient pas partir. L'horreur, enfin, prit place avec l'arrivée du Sycophante et de ses étranges lutins, les Remords. Le seul avantage que Seth pu constater dans tout cela, c'était la prise de pouvoir de deux membres de l'orphelinat qui avaient toujours su faire preuve d'autorité au sein de leur petite communauté, imposant alors un système judicieux qui n'était pas sans rappeler celui de leur propre pays comme dans les contes que sa mère lui racontait. L'enfant n'a plus jamais pu dormir paisiblement et son regard s'est un peu durci avec le temps, cependant il demeure toujours aussi pur et innocent, remplissant son rôle de cueilleur comme on le lui avait assigné et comme il se plaisait à l'accomplir, certain de contribuer ainsi à la bonne marche de leur système de survie dans cet endroit hostile. Seth est un garçon comme un autre et son histoire continue.