Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance.



 
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 Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance.

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Lucifel J. Sveinsson

Bitch plz
Lucifel J. Sveinsson
♣ Bitch plz ♣


Rang : Prince.
Totem : Corbeau.
Messages : 806
Age : 31
Pseudo : Stonefox.

Once upon a time
Âge du personnage: 12 ans.
Date d'arrivée à Cloverfield: 4 Octobre 1940.

Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance. Empty
MessageSujet: Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance.   Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance. Icon_minitimeMar 14 Aoû - 1:15

PREDEF


Say where is my shame.
"Feat. Tom Riddle, Harry Potter"


Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance. TAnKu
▬ ÂGE : 12 ans.
▬ DATE DE NAISSANCE : 2 Janvier 1929.
▬ CATÉGORIE : Rafined Class.
▬ RANG : Prince.
▬ DATE D’ARRIVÉE A CLOVERFIELD : 4 Octobre 1940.
▬ PÉCHÉ MORTEL : Colère et Orgueil.
▬ TOTEM : Corbeau.



I will do you harm.
J'incarne le mal, pour ça j'aurai l'oscar.

Assis par terre dans le salon, les jambes à demi pliées ramenées devant lui, Lucifer faisait rouler un petit train en bois en suivant les motifs tracés sur le tapis sur lequel il jouait en silence. Il n'avait jamais été particulièrement bavard – ni même réellement taciturne, disons qu'il ne parlait que lorsqu'il avait quelque chose à dire – et son père tenait à ce que silence soit fait la plupart du temps. Les piaillements enfantins lui déplaisaient. De toute façon, Lucifel n'était pas le genre d'enfant à piailler. Auprès des adultes, le garçon passait pour un enfant très mature, une sorte de petit miracle de la nature, un prodige d'intelligence et une merveille de précocité. Il y avait quelque chose chez lui qui fascinait les adultes et qui poussait les enfants à le considérer comme leur chef. Il était là, telle l'éminence grise du clan, moralisateur et pervers, menant son petit groupe de gamins par le bout du nez. Ils le suivaient, l'adulait, malgré ses caprices et la crainte qu'il inspirait parfois de part son attitudes et son imagination débordante lorsqu'il s'agissait de punir ceux qui ne lui plaisaient pas. On s'associait à lui par admiration, par profit, par peur... Qu'importe ? Tant qu'il était le centre de toute cette joyeuse attention, Lucifel n'en avait que faire. Les seuls qui semblaient hermétiques à son charme restaient ses parents. Sa mère. Le garçon envoya le train rouler plus loin jusqu'à ce qu'il heurte le mur avec un bruit sourd.

Ne pas susciter son attention le rendait purement et simplement dingue. Plus que d'habitude, s'entend. Sa génitrice ne pouvait décemment pas l'ignorer, lui, le fruit de ses entrailles. Alors il lui courait désespérément après dans l'espoir qu'elle cède à ses avances répétées. Avec les autres, il n'avait pas vraiment ce problème : ils s’agglutinaient assez naturellement autour de lui et Lucifel pouvait même les fuir et les rejeter à sa guise pour les reprendre plus tard, changeant constamment de « favori ». Il n'aimait pas s'investir affectueusement. De toute façon, il était incapable de ressentir de l'affection. L'Amour était une chose abstraite et inconnue : ses parents ne lui servaient que de l'indifférence même si parfois son père se fendait d'une tranche de sévérité exigeante. Son père, Sveinn Rikharðsson, était le pasteur de son village en Islande. C'était un homme strict et froid et Lucifel avait été élevé dans la plus grande austérité et la plus grande piété. C'était à se demander pourquoi le garçon portait alors le nom du Malin. Un coup de sa mère. Sa mère qui, pire que la dureté du pasteur, le détestait et affectait soigneusement de se désintéresser de lui comme d'une vilaine tache indélébile sur un mur. Alors tous ses gentils sentiments positifs, il ne les connaissaient pas. Il les voyait chez les autres, les copiait mécaniquement, mais se révélait incapable d'y mettre du relief. Oh, c'était un fin comédien, Lucifel. Mielleux et doucereux, il savait susurrer les mots d'amour et d'amitié éternels les plus fleuris. Il savait faire naître une confiance aveugle chez ses pairs, la conviction qu'il n'était que le sympathique fils du pasteur. Il savait manipuler ses « amis » pour arriver à ses fins. Lucifel savait beaucoup de choses, outre une honorable culture générale et une bonne aptitude à lire, écrire et compter. Mais il ne savait rien des relations sociales normales et de la tendresse, du bonheur familial et des sentiments qui réchauffent le cœur. Son cœur à lui était froid, dur et noir. Mais il ne pouvait regretter ce qu'il ne connaissait pas. Alors, entêté dans son monde de distance glaciale, il raillait le petit théâtre affectifs de ses sous-fifres. Ou presque. Sa mère restait sa seule et unique blessure : béante, sanguinolente et purulente. Pleine de vers et de moisissures.

Peut-être était cette première et dernière plaie qui le rendait tel qu'il était ? Sadique. Tordu. Pervers. Caractériel. Mauvais. Hystérique. Mesquin. Dédaigneux. Sale. Comme un animal sauvage rendu fou par une pointe de flèche. Cette pointe devait être fichée dans sa tête pour l'avoir ainsi fait dégénérer. Ou dans son cœur, pour en avoir fait un monstre. Les deux sûrement. Car il y avait bien quelque chose qui déraillait dans sa tête. Son attitude bien trop mature pour un enfant – ce développement hasardeux – mais cette façon d'être à la fois profondément infantile. Cette absence apparence de souffrance. Cette barrière qu'il mettait entre lui et les autres tout en jouant avec eux, se jouant d'eux. Ce rapport anormal avec autrui. Ce désir insatiable de faire du mal, de dominer, de maîtriser. Cette obsession de la mort. Lucifel avait ce cimetière d'animaux caché derrière un amas de rocher, loin dans la lande. Il y enterrait les animaux morts ramassés ça et là. A moins qu'il ne les ait volontairement tués, pour voir la vie s'échapper entre ses doigts, fasciné par la fragilité de l'existence. Les animaux les plus gros qu'il avait enterré était des renards. Les plus petits des insectes. C'était satisfait qu'il revenait, les mains et les ongles pleins de terre.

Oh, évidemment, il ne parvenait pas à charmer tout le monde. Il y avait bien des irréductibles et des méfiants qui pensaient voir clair dans son jeu et se méfiaient de lui comme de la peste. Comme de celui dont il empruntait le nom. Lucifel avait beau être le fils du pasteur et un enfant de chœur dans l'église du village, certains pensaient qu'il valait mieux l'exorciser. Il y avait cette lueur dans ses yeux couleur d'orage, cette nuance dans son sourire en coin qui faisaient qu'il était effrayant pour qui savait y regarder de plus près. Mais qu'importe ces quelques clairvoyants qui voyaient en lui le Diable... Il était la mauvaise herbe. Et la mauvaise herbe repoussait toujours.


I'm a victim of your charm.
Un homme sain ne torture pas ses semblables. Ce sont les victimes qui se changent en bourreaux.

RÉSUMÉ DE MON PAVÉ ♥
Lucifel est né en Islande dans un petit village côtier. Sa mère ne le désirant pas, elle ne s'en ait jamais occupé correctement, allant jusqu'à le malmener quand il n'était qu'un bébé. En grandissant, elle cessant de le maltraiter physiquement et se borna à l'ignorer. Lucifel grandit seul, ne pouvant compter sur l'affection d'une mère qui le détestait ni sur celle d'un père pasteur peu aimant. Le garçon aurait pu se damner pour n'avoir qu'une once de l'amour de sa mère, aussi s'affaira-t-il à se rendre malade pour attirer son attention, sans succès. Lucifel trouva donc en ses camarades un exutoire intéressant pour passer sur eux tout son mal-être, à défaut de pouvoir tuer son père qu'il rendit responsable du désamour de sa mère. Cependant, un jour, la chance lui sourit et son père tomba d'une falaise lors d'une promenade. Lucifel n'alla pas chercher de l'aide et le regarda mourir. Mais sa mère ne l'aima guère plus, au contraire.
Mais un jour, elle lui annonça qu'ils partaient en voyage tous les deux, sur un bateau. Lucifel l'attendit sur le paquebot, attendant qu'elle règle un détail de dernière minute, mais sa mère ne vint jamais. Elle l'avait abandonné sur un navire en partance pour l'Angleterre, sans aucun moyen de revenir. Désespéré, Lucifel débarqua donc à Plymouth et erra sans but. Là, il fut recueilli par la famille Overstreet qui avaient déjà un fils plus âgé : Volodia.
En Septembre 1941, ils s'offrirent un voyage en dirigeable qui tourna au drame : le zeppelin explosa en vol, tuant Monsieur et Madame Overstreet et laissant les deux garçons orphelins. Ils furent donc envoyés à Cloverfield, pour le pire.






Vigdís Jónsdóttir avait toujours été une fille discrète au tempérament solide hélas enterré sous une épaisse couche de manque de confiance en soi. Elle avait toujours pensé être inutile, banale et pas spécialement désirable, qu'elle aurait une vie plate et médiocre et qu'elle mourrait pitoyablement d'un accident domestique des plus mornes à un grand âge, comme en glissant sur une savonnette avant de se briser le crâne sur le carrelage. Elle cachait son visage blafard derrière de longs cheveux châtain foncé qui, dans son adolescence, cascadaient jusque dans ses reins. Ses cheveux étaient la seule partie de son corps qui la satisfaisait : son épaisse frange qui dissimulait presque ses yeux vert de gris, sa lourde chevelure souple qui reflétait si bien la lumière orangée du crépuscule chatoyant. La plupart des gens s'accordaient à dire qu'elle avait quelque chose de beau en elle, dans sa délicatesse naturelle, dans sa décence gracieuse, dans la finesse de son corps élancé, plus grande que les filles de son âge, dans ses grands yeux tristes et dans son visage de poupée morte. Pourtant, elle ne faisait pas partie de l'archétype de la jolie fille qui fait se retourner les garçons : pas de gros seins, pas de vulgarité aguicheuse, pas de lèvres comme des fruits trop mûres, pas de dégaine de « jeune femme libérée ». Elle demeurait invisible pour la majorité mais semblait brûler la rétine de ceux qui la remarquait. Quand elle s'ouvrirait, Vigdís aurait un charme fou. Si seulement elle prenait confiance en elle.

Vigdís se traînait d'amourettes lassantes en histoires routinières jusqu'à ce qu'elle rencontre Sveinn Rikharðsson à la fête du village – Djúpivogur, au Sud-Est de l'Islande. Comme à son habitude, elle avait discuté un peu avant de s'asseoir sur une botte de foin avec un verre d'alcool léger entre les mains, regardant sans trop les voir les mêmes éternels villageois danser autour du feu. Ce fut au moment où elle songeait à s'éclipser pour rentrer chez elle qu'il se planta devant elle. Surprise, Vigdís avait relevé la tête vers l'homme et l'avait dévisagé : il était grand, brun, viril, charmant et bien habillé. Ses traits étaient durs et ses yeux noirs auraient pu être froids, mais il lui souriait. Il lui avait tendu la main, elle avait posé son verre pour l'attraper et ils avaient dansé avant de passer toute la soirée ensemble. Ils ne s'étaient pas embrassés et Sveinn l'avait raccompagnée chez elle en gentleman. Pour une fois, elle rencontrait un homme qui ne pensait pas qu'à mettre sa main dans sa culotte. Il était élégant, poli, galant, intelligent et intéressant. Il avait trois ans de plus qu'elle et venait de Reykjavík. Il remplaçait le pasteur du village mort la semaine dernière. Sveinn la revue le lendemain et ils eurent une longue conversation animée. Pour la première fois de sa vie morne et plate, Vigdís se sentait exaltée. Elle attendait ses visites avec l'impatience d'une gamine avant Noël et ne pouvait s'empêcher de sourire pendant leurs conversations, le rose aux joues. Ils se donnèrent plusieurs fois rendez-vous et à chaque fois, elle en revenait le cœur battant. A l'évidence, elle était tombée amoureuse de lui. Il finit par l'embrasser, ils sortirent ensemble, ils s'arrangeaient pour se voir tous les jours ou presque. Sveinn la demanda en mariage et elle accepta. Ils et emménagèrent ensemble dans le presbytère.

« Cette maison est si grande pour deux personnes... », avait fini par faire remarquer Vigdís, nouvellement Madame Rikharðsson. « On y élèvera nos futurs enfants. », avait répondu Sveinn le plus naturellement du monde. Les enfants. Quelque chose se craquela chez la jeune femme en entendant ce mot qu'elle avait tant craint. Jamais elle ne s'était découvert de fibre maternelle et elle s'était toujours dit qu'elle n'enfanterait jamais, par choix. Elle se voyait avec un mari, oui, mais pas avec des enfants, pas même un seul. Elle avait peur. Peur de ne pas être à la hauteur, peur de ne pas savoir s'en occuper, peur de ne pas réussir à l'aimer, peur que l'enfant ne brise son couple, peur de perdre sa liberté et les avantages de ne pas avoir d'enfant à charge, peur d'être déçue, peur d'accoucher. Ça lui allait très bien de rester des journées entières seule avec Sveinn, de faire l'amour avec lui n'importe quand et n'importe où dans la maison, d'être une jeune mariée sans moutards braillards dans les pattes. Avoir des enfants ? Hors de question. Vigdís évita soigneusement le sujet de conversation avec son mari jusqu'à ce que la confrontation devienne inévitable. Lui manifestait l'ardent désir d'avoir une descendance et après moult discussions houleuses qui terminèrent en pleurs et en claquements de porte, Vigdís finit par rendre les armes, fatiguée de se disputer avec son époux bien-aimé. « Très bien, chéri, on fera comme tu voudras... Mais rien qu'un ! Et c'est moi qui choisirai son prénom. ». Elle arrêta de le repousser avant qu'il ne puisse finir son devoir d'homme et laissa la nature faire son œuvre. Comme une fatalité, elle tomba aussitôt enceinte après leur première tentative, fertile alors qu'elle espérait secrètement être stérile. Les premiers mois furent un calvaire tant Vigdís fut malade. Même pas encore né que ce petit monstre lui donnait déjà la nausée. Puis elle se trouva grosse, laide, pataude et indésirable. Ce gros ventre disgracieux, elle le détestait, tout comme elle maudissait l'organisme parasite qui grandissait dans ses entrailles et qui lui donnait des coups de pied et des coups de poings. Plus le temps passait et moins elle se sentait capable de se réjouir de la venue de l'enfant. Elle se sentit se faner et dépérir, ne faisant que pleurer et se traînant des journées entières dans son lit. La dépression pré-natale rendit la grossesse puis l'accouchement difficiles. Vigdís le vécut comme une boucherie sanglante. Et cette douleur ! Elle eu l'impression de vivre l'Enfer. Elle découvrit qu'il s'agissait d'un petit garçon chétif. La sage-femme l'emporta aussitôt après l'avoir sorti pour le laver et Vigdís en fut soulagée, peu désireuse de tenir cet animal dans ses bras. Plus tard, on lui demanda comment elle voulait l'appeler. Vigdís resta muette avant de déclarer d'un ton absent :

« Lucifel. »

On la regarda de travers et elle renchérit :

« C'est l'Antéchrist. Je le sais. Sveinn le saura aussi. »

Sveinn ne revint de son séminaire que quelques jours plus tard, visiblement affecté de n'avoir pu être là pour l'accouchement de son épouse bien-aimée. Quand il s'enquit du prénom et qu'elle lui répondit, Sveinn sembla verdir et il hurla au blasphème. Mais Vigdís ne cessa d’ânonner, sans en démordre :

« C'est l'Antéchrist. Tu comprendras quand tu le verras. »

En vérité, Vigdís ne croyait guère ces histoires d’Antéchrist. Elle détestait simplement son bébé.


*


Vigdís fut brutalement arrachée au sommeil par les pleurs de son bébé qui dormait au bout du couloir. Le gosse était à présent âgé de onze mois et sa mère n'arrivait toujours pas à s'y faire. Elle ne parvenait pas à s'attacher à cette bestiole maigrichonne aux yeux énormes et à la bouche édentée. Il avait onze mois et commençait à peine à ramper ; il avait fallu qu'elle tombe sur un gamin attardé, c'était bien sa veine ! Depuis l'arrivé du bébé, elle se sentait plus déprimée et irritable que jamais, à la fois haineuse contre le moutard et rongée par la culpabilité que suscitait un tel dégoût de son enfant. Mais elle ne pouvait s'empêcher d'être excédée par ce gamin pleureur avec qui elle ne savait pas comment réagir. Pourtant, ce n'était pas les enfants qui lui posaient problème mais c'était le fait que ce soit le sien qui la bloquait.

La jeune femme se leva, la vue troublée par le sommeil, d'une humeur massacrante. Elle jura lorsque son pied buta dans la table de nuit et, en entendant sa voix, le bébé se mit à hurler de plus belle. Les nerfs déjà à vif, Vigdís s'écria :

« La ferme ! J'arrive ! »

Elle tira la porte déjà entrouverte et remonta le couloir jusqu'à la chambre du bébé. Elle poussa la porte et posa des yeux froid sur le petit être cramponné aux barreaux. Il avait le visage un peu rouge à force de hurler et Vigdís eu un frisson de dégoût. Elle soupira et fit volte-face pour aller chercher un biberon dans la cuisine. La jeune femme se maudissait d'avoir cédé aux avances insistantes de son mari concernant les enfants. Elle savait bien qu'elle n'arriverait pas à l'aimer, qu'il ne serait qu'une source inutiles de problèmes ! Comment faisaient les autres femmes pour aimer et s'occuper de leurs gosses ? A ses yeux, cela demeurait un mystère. Une chance, elle avait au moins perdu le poids pris pendant sa grossesse et peut-être même plus ; l'arrivée de ce gamin lui avait coupé l'appétit. Elle ne supportait plus d'être seule à la maison avec Lucifel, quand son mari partait à cinq heures du matin pour Reykjavík comme aujourd'hui. Plus de tranquillité, plus de journées à deux, moins de sexe. Vigdís prit un brique de lait et songea à le faire chauffer à la casserole. Elle laissa vite tomber cette idée : si ce petit parasite avait si faim que ça, qu'il mange froid ! Accablée, le biberon à la main, elle remonta les escaliers en proie à un mal de tête croissant.
Et l'autre lardon qui hurlait toujours à plein poumons...

« Ta gueule !! », hurla-t-elle.

Sous l'effet de la colère, elle lui jeta le biberon rempli de lait. Atteint à la tête, le bébé retomba en arrière dans son berceau, gémissant. Une marque rouge fleurit sur son front pâle là où l'objet l'avait percuté et les larmes lui montèrent aux yeux. Vigdís sentit quelque chose d'affreux lui serrer la gorge ; un mélange de triomphe, de haine et de culpabilité. Il se remit à pleurer en agitant les bras et les jambes, échoué sur le dos comme une baleine morte. Sa mère le sortit de son berceau comme s'il avait été un ballot de chiffons et le secoua.

« Tais-toi ! Tais-toi ! Tais-toi !! »

Incapable de se maîtriser, Vigdís lui donna deux claques, un aller-retour qui cingla les deux joues potelées du bébé. Après un hoquet de stupeur, le bébé se tut quelques secondes avant de se remettre à hurler de plus belle, les joues écarlates, de la morve partout. Vigdís lâcha le bébé dans son berceau, la gorge serrée par un horrible sentiment de culpabilité démunie. Elle recula jusqu'à la porte et s'enfuit en courant. Elle eut envie de se jeter par la fenêtre. Ou de partir pour ne plus jamais revenir. Ce bébé la rendrait folle. Mais elle aimait Sveinn. Vigdís persisterait à dire à son mari que leur fils était l'Antéchrist – pure invention de sa part – et peut-être qu'il se résoudrait alors à le noyer dans l'océan ou de l'abandonner dans les landes hostiles... Peut-être que Sveinn aurait la force de tuer le bébé, lui...


*


Mais six ans plus tard, Lucifel n'était toujours pas mort. Il avait bien grandit, même s'il restait plus petit et maigre que les autres gamins de son âge. Il avait sept ans. Lucifel était toujours malade, à croire qu'il le faisait exprès... Il ne se passait pas une semaine sans qu'il n'ait mal quelque part, ne vomisse, n'attrape un quelconque virus... Avec lui, Vigdís se limitait au minimum vital : elle lui faisait à manger et le soignait. Point. Pas une once d'affection de sa part ; toutes les interactions qu'elle était obligée d'avoir avec son rejeton étaient froides et mécaniques. Plus il grandissait, plus elle pouvait se permettre de le laisser livré à lui-même. Il avait rapidement dû s'habiller, se laver, se coucher, aller aux toilettes et manger seul, sa mère étant dégoûtée par son contact trop prolongé. Pas de jeux. Pas de câlins. Pas de bisous. Pas d'histoires avant d'aller au lit. Pas de mots tendres. Rien. Elle fuyait son regard, elle fuyait la conversation, elle fuyait son contact, elle le fuyait tout court.

C'est pour cela que Lucifel avait commencé à se rendre malade. Dans son esprit d'enfant, c'était logique : s'il était toujours malade, elle devrait s'occuper de lui et alors elle finirait par avoir pitié au moins... et puis elle l'aimerait un jour, à force de le voir si mal... Alors certains matins, l'hiver, avant d'aller à l'école, il remplissait un seau d'eau à la pompe. L'eau était glacée mais, après une inspiration pour se donner du courage, Lucifel plongeait ses deux mains dans le seau. Le froid intense lui agressait les mains comme de multiples aiguilles enflammées, acides. Il gémissait entre ses dents, haletait, pleurait parfois, à cause de la douleur que l’immersion de ses mains occasionnait. Après cinq minutes, il les retirait de l'eau – elles étaient bleues, violettes – et remettait ses gants avant d'aller à l'école. Dans l'après-midi, il ne manquait pas d'être brûlant de fièvre et alors il était obligé de revenir à la maison. D'autres fois il sortait pieds nus, sans manteau, ni gants, ni bonnet, ni écharpe et gambadait dans la neige jusqu'à avoir les pieds affreusement douloureux et de ne plus pouvoir tenir d'être dans le froid. Là encore, il était bon pour une sacrée pneumonie. L'été, quand il n'y avait plus de neige et que l'eau de la pompe n'était pas assez froide pour tomber malade, Lucifel enfonçait ses doigts au fond de sa bouche pour vomir. Il se cognait contre les pierres, les murs. Il faisait exprès de tomber jusqu'à s'arracher la peau des genoux et des coudes. Tout était bon pour se faire mal et avoir l'air mal en point pour solliciter l'affection maternelle.

Sans succès.

Vigdís ne s'émouvait guère des maladies ou des blessures de Lucifel. Elle se contentait de le maintenir vaguement en vie, sans montrer le moindre signe de compassion. Inutiles, ses tentatives d'attirer son attention étaient tout bonnement inutiles. Pourtant, son obsession pour sa mère et son désir mordant qu'elle l'aime ne faisait que grandir de jour en jour, jusqu'à ce qu'il nourrisse des idées malsaines. Tout ça, c'était la faute de son père. Son père, il devait mourir car il monopolisait sa mère, c'était lui qui empêchait sa mère de l'aimer. Il fallait se débarrasser de lui. Sveinn n'était pas spécialement aimant non plus. Très peu démonstratif, il n'avait jamais témoigné d'autres signes de tendresse à Lucifel qu'un vague sourire de fierté quand celui-ci ramenait une bonne note de l'école ou se distinguait. Pour le reste, il était sévère et froid. Son pasteur de père l'avait fait entrer dans le cercle très privilégié des enfants de chœur et il sembla que ce fut son seul « cadeau ». Sveinn ne croyait pas vraiment que son fils fut l'Antéchrist, aussi étrange fut-il parfois. Mais de l'étrangeté de son fils, Sveinn ne voyait que la partie immergée de l'iceberg car pour en voir plus, il aurait fallu qu'il s'intéresse un peu plus à sa progéniture.

Il ne savait pas, par exemple, que quand Lucifel partait dans la lande, c'était souvent pour ramasser de petits animaux morts et les enterrer. Lucifel avait créé un cimetière d'animaux. Le plus gros qu'il avait enterré était un renard polaire et le plus petit était une sauterelle. Il revenait les mains et les genoux plein de terre, on supposait qu'il avait innocemment joué, mais Lucifel se prenait pour un artiste mortuaire. Parfois il les déterrait pour regarder leurs squelettes et quand ils étaient intacts, il les emportait chez lui pour les conserver dans des boîtes. Mais ce qu'il préférait garder, c'était les dents. Les dents il les enlevait avant de mettre l'animal en terre. Il y allait au marteau, au couteau, à la pince pour les extraire et parfois briser la mâchoire. C'était un travail méticuleux car il ne fallait pas les casser. Il les nettoyait ensuite et les mettait dans des bocaux étiquetés du nom de l'espèce de l'animal. Il en avait préparé un avec écrit « Humain » mais il ne contenait que ses propres dents de lait ainsi que celles qu'il parvenait à extorquer à ses camarades.

Ah, ses camarades... Il ne leur vouait aucune affection si ce n'est celle qu'on peut ressentir envers un animal pathétique, stupide et vaguement amusant. Tout comme sa mère le considérait comme un étranger et un indésirable, Lucifel n'avait qu'une faible estime d'autrui. Quant au fait qu'on puisse éprouver de l'amour pour quelqu'un, ça lui était totalement inconnu... Pourtant, le garçon savait se faire désirer, entourer et admirer. A défaut d'être populaire chez lui, le petit brun savait se rendre attractif au-dehors. Les adultes admiraient sa vivacité d'esprit en arithmétique et sa culture étendu pour un enfant de son âge, ils applaudissaient sa débrouillardise et son habileté à réfléchir, pardonnant sa santé fragile et son manque de maturité affective. Les plus grands enfants le considéraient autant avec curiosité qu'avec défiance. Quant à ses camarades, ceux de son âge, ainsi que les plus jeunes, l'avaient érigé en leader naturel ; il était l’éminence grise de leur petit groupe de gamins et chacun voulait être son « meilleur ami », lequel changeait souvent au gré des caprices de Lucifel. Le plus pressé d'être le plus proche de Lucifel était Oskar. Et dans une certaine mesure, Oskar l'était plus que les autres. Leurs mères étaient très proches – bien que dans le petit village, tout le monde se connaisse – et ils se fréquentaient depuis tout petits. Oskar avait cinq ans de plus que Lucifel et même s'il aurait du faire partie du groupe des grands, il traînait avec les petits. Les grands se moquaient de lui parce qu'il était encore un enfant au fond de lui, parce qu'il préférait jouer à chat plutôt que de courir les jeunes filles aux bals du mercredi. Et aussi parce qu'il n'y avait pas de Lucifel dans le groupe des grands...


*


« Oskaaaar. Regarde-moi, ça me va bien, non ? »

Oskar se retourna vers Lucifel, surpris. Il avait émergé de la chambre des parents du plus grand, vêtu d'une robe à sa mère : une simple robe jaune à bretelles avec un jupon un peu bouffant. La robe était trop longue pour Lucifel : il avait fait ses nœuds aux bretelles pour les raccourcir mais malgré cela, elles glissaient sur ses épaules menues. Quant au jupon, il l'avait retroussé vers l'intérieur et épinglé pour faire des ourlés de fortune et ne pas s'entraver dedans. Oskar considéra cet étrange tableau avec surprise. Ce Lucifel de huit ans avait quelque chose de séduisant ainsi grimé en fille, ça lui allait bien. La robe était trop large pour son corps fluet, mais dans un sens, elle tombait comme il faut, bruissant doucement contre sa peau douce et diaphane piquée de quelques petits grains de beauté. La jaune vif faisait ressortir la douceur rosée et ténue de ses lèvres discrètement pulpeuses ainsi que l'éclat violine de ses yeux sombres somme un ciel d'orage. Lucifel avait quelque chose de beau bien qu'il soit loin d'être parfait avec ses genoux noueux, sa petite taille, la minceur osseuse, son teint blafard, ses cernes marqué, son visage pointu et ses formes plates et anguleuses. Mais il avait cette délicatesse en lui, dans son visage poupin, dans ses doigts fins et dans ses boucles brunes et souples. Il y avait du charme dans ce grain de beauté au coin de l’œil, tout près de ses longs cils noirs.

« Ça te va bien... »

Lucifel sembla satisfait et tourna rapidement sur lui-même pour faire voler le jupon, révélant ses jambes fines jusqu'à mi-cuisses. Il gloussa et l'entraîna dehors. Le garçon lui tenait fermement la main en courant à en perdre haleine dans la steppe islandaise, puis il le lâcha et tourbillonna, les bras levés vers le ciel, hurlant une chanson à plein poumon. Sa voix se perdait dans le vent, emportée loin par les bourrasques. C'était drôle de voir Lucifel vivant. Lui qui était toujours si mort. Le garçon couru vers un rebord abrupte et Oskar le suivit promptement, inquiet qu'il ne tombe, poussé par le vent qui soufflait si fort. Lucifel se pencha et agita doucement la main en regardant un point fixe en contrebas. Oskar suivit son regard : il n'y avait rien d'autre que de l'herbe et des rochers. Pourtant, Lucifel souriait doucement et continuait d'agiter la main avant de la baisser.

« Qu'est-ce que tu fais... ? »
« Je dire bonjour à une amie. »


Le plus grand avait eu beau scruter, il n'y avait personne.


*


Le soir venu, après avoir couru toute la journée, il étaient rentré pour se protéger de la pluie battante, cette fois chez Lucifel. Oskar avait pris place dans un des grands fauteuils en cuir du salon et l'avait rapproché de l'âtre. Lucifel avait préféré s'agenouiller sur le tapis, devant le feu, lissant le jupon de la robe pour former autour de lui un cercle parfait ; il fredonnait une petite comptine d'un air tout à fait innocent. Il avait l'air pur, fragile, inoffensif et adorable dans cette robe, avec ses joues rougies par la course éperdue de tout à l'heure et ses cheveux encore mouillés qui se collaient à sa peau, en forme d’accroche-cœur. Pur, fragile, innocent, vulnérable,... tout ce qu'il n'était pas. Oskar le voyait à présent comme une évidence : Lucifel n'était pas ce qu'il prétendait être, pas du tout. Il était comme ces créatures fourbes qui se servaient des faiblesses communes à tous les Hommes pour mieux les endormir. Oskar avait toujours été friand de romans terrifiants et le garçon lui rappelait ces démons, ces vampires, ces monstres à l'apparence d'enfant. Dans sa robe jaune, Lucifel tenait parfaitement le rôle : pauvre petit, si mignon, si beau, si attirant, avec ses boucles brunes et ses sourires ; ses larmes et ses supplications... « J'ai perdu ma maman », dit le monstre avant de planter ses crocs dans la chair d'une passante compatissante. « J'ai perdu ma maman »... Lucifel aussi avait perdu la sienne d'une certaine manière ; et maintenant, tout en affectant de ne pas le faire, le garçon vivait à ses crochets à lui, à Oskar, exigeant de lui qu'il le suive partout comme un chien. « Colle-moi, suis-moi, regarde-moi, joue avec moi, admire-moi, aime-moi... ».
Lucifel était une charmante créature vampire, terriblement mature, attachante et persuasive. A la fois fascinant et écœurant. Toujours tout seul, errant dans le noir, résolvant des puzzle et des énigmes complexes avec une logique implacable et tranquille, pressant sa peau contre la sienne sans jamais que cela mène nulle part. Stérile. Stérile et immuable. Lucifel n'évoluait pas, il ne grandissait pas ; il stagnait juste. Oskar avait l'impression que Lucifel avait toujours été le même Lucifel, qu'il ait quatre, sept, neuf ou dix ans. Comme s'il avait grandit en vitesse accélérée et qu'il avait atteint son maximum. Mais quel maximum ! Il avait un potentiel énorme, certes. Mais Oskar savait que cette impossibilité de changer était une faiblesse également. Parce que lorsqu'il aura trente ans, il se comporterait de la même manière qu'a huit ans, capricieux et borné, puéril, fermement campé sur les positions qu'il pensait être les bonnes.
Un gosse qui avait toujours été à part, surélevé par rapport aux autres, comme Lucifel l'était parmi les autres enfants. Un gosse démoniaque dans les entrailles duquel brûlait l'Enfer, le Malin, le Péché. Une putain de saloperie en culottes courtes, trop propre sur elle avec ses cheveux bien coiffés, sa veste bien boutonnée et ses chaussettes bien remontées. Mais un foutu cancer dont l'intention était – bien sûr – de tout détruire, de tout faire mourir, de se venger. Se venger de quoi ? Une raison conne, à coup sûre. Juste pour avoir le plaisir d'être au centre de quelque chose de grandiose. Grandiosement pourri. La tumeur Lucifel était encore petite, mais elle grossirait. Oh oui, elle grossirait.

Oskar se rendit compte que Lucifel chantait Twinkle Twinkle Little Star, comme souvent. Il la chantait plus lentement qu'elle n'était censée être chantée, à voix basse. Oskar avait toujours trouvé ça plutôt flippant et il n'aimait pas quand Lucifel la chantait. Surtout quand ils étaient dans le noir et qu'il le regardait fixement avec un sourire. Ça l'amusait. Il faisait exprès. Et son grand jeu c'était de traduire et adapter la comptine dans toutes les langues qu'il connaissait. Il la chantait même à Gilda, en langage des signes, tout en formant très distinctement les mots sur ses lèvres.

« Then the travler in the dark thanks you for your little spark. He could not see which way to go if you did not twinkle so... »

Oskar fut secoué d'un frisson. Lucifel était ce voyageur de l'ombre qui se jetait sans pitié sur les lueurs que ses yeux glacés repéraient dans les ténèbres au cœur desquels il se complaisait. Il s'accrochait à ces feux follets et aspiraient toute leur lumière comme un trou noir avant de les laisser là, vides et ternes. Oskar était un feu follet. Il sentit une inhabituelle vague de haine et de rancœur l'envahir, ça ne lui ressemblait pas ; mais il voulait frapper et secouer Lucifel. Lui faire du mal. Lui hurler dessus. Il lâcha brutalement :

« Arrête de chanter cette chanson, je la déteste. »

Lucifel cessa, surpris, et battit des cils d'un air incrédule. C'est qu'il n'a pas l'habitude que son toutou lui parle comme ça. Il prend la mouche. Et aussi ce ton minaudant et doucereux particulièrement désagréable :

« Je crois que l'air vif t'est monté à la tête, Oskar, tu commences à te prendre pour ce que tu n'es pas. »

Ah. Nous y voilà enfin.

« Ah oui ? Et qu'est-ce que je suis ? », s'enquit le blond en se penchant en avant, les yeux plissés.

Lucifel le regarda droit dans les yeux, battit des cils à nouveau et souffla, la tête penchée sur le côté :

« Rien... »
« Ah, voilà ! Quand je te pose une question importante, tu te défiles et tu ne veux p- »
« Non, je veux dire... La réponse c'est : rien. C'est ce que tu es. »


Oskar manqua de s'étrangler avec sa salive. Il ne savait pas si le plus choquant était le fond ou la forme : la réponse ou ce ton calme et tranquille. Il sentit des larmes brûlantes lui monter aux yeux et éructa :

« Mais putain, t'es vraimen- »
« Je rigole. »
Après un temps, il ajouta comme pour bien se faire comprendre : « Haha. »

Mais le plus grand savait qu'il ne plaisantait pas. Mais que pouvait-il répondre ? Rien du tout. Alors pendant son mutisme, Lucifel se remit à chanter. Cette fois, c'était une comptine populaire qui se chantait dans la région. Il balançait doucement sa tête et chantonnait répétitivement :

« Pauvre jolie Solveig, ton amant ne t'aime pas. Pauvre jolie Solveig, elle couru vers son trépas. Pauvre jolie Solveig, de la falaise se jeta. Pauvre jolie Solveig, dans la mer se noya. Pauvre jolie Solveig, un fantôme elle demeura. Pauvre jolie Solveig, le cimetière elle hanta. Pauvre jolie Solveig, de l'amour elle se vengea. Pauvre jolie Solveig, les amants elle assassina. »
« Arrête ça... Solveig n'existe pas. »


Oskar frissonna. Il préférait se dire sans grande conviction que les fantômes n'existaient pas mais il ne pouvait vraiment se décider. Lucifel gloussa :

« Bien sûr que si. Je lui ai déjà parlé. »
« Menteur... »
« Non. Elle est dans le cimetière qui jouxte l'église. Et puis il y a une croix sur la falaise à l'endroit où elle s'est élancée. Elle ne pourra jamais aller au paradis... Ceux qui se sont suicidés ne peuvent y aller. Alors elle reste là et elle perturbe les cérémonies de mariage... »


Lucifel se retourna et attrapa un tas de feuilles par terre pour lui montrer. C'était des dessins d'enfants. Oskar les regarda en déglutissant : c'était des croquis maladroits au pastel, des croquis de monstres difformes et torturés. Oskar, hérissé, faillit les jeter dans le feu mais au lieu de ça il les lâcha par terre.

« C'est dégoûtant. Et ça n'existe pas ! »
« Si tu le dis. »


Et Lucifel se tut, fixant le feu en marmonnant l'air de Pauvre jolie Solveig.


*


Ce n'était censé être qu'une promenade. Ce n'était censé être qu'une discussion entre père et fils. Mais en marchant près du précipice – le même à côté duquel avaient joué Lucifel et Oskar un an plus tôt – Sveinn avait glissé et il avait dévalé la pente raide pour s'écraser en contrebas, brisé sur les rochers. Faible, la respiration sifflante, Sveinn toussa du sang et crachota :

« Lu-Lucifel... Va... Va chercher... de l'aide... ! »

Mais son fils ne bougea pas. Il le regardait fixement, impassible, penché vers lui sur la falaise. Sveinn répéta difficilement et Lucifel lui fit signe qu'il n'entendait pas. Impossible. Même si les bourrasques venant des terres étaient fortes, ceux venant de la mer se fracassaient contre la falaise et la remontait furieusement de sorte que le son parvienne bien aux oreilles de Lucifel. La direction dans laquelle ses cheveux noirs s'ébouriffaient en était la preuve. Et puis même sans ça, son fils voyait bien qu'il avait besoin d'aide, non... ? Le garçon s'assit en tailleur sur le rebord, penché, et ne le quitta pas du regard. Il observait son agonie. Il assistait silencieusement à sa mort. Vigdís avait peut-être raison en fin de compte... Telle fut sa dernière pensée, avant qu'il ne succombe à ses blessures, emportant en guise de dernière image la petite silhouette assise et silencieuse.

Quand Lucifel rentra seul ce soir-là, Vigdís s'affola et, sans se préoccuper de son fils, elle couru pour chercher son mari. Dans l'obscurité, elle ne le vit pas. Ce n'est que le lendemain quand tout le village se mit à le chercher qu'on le retrouva, déjà entamé par les oiseaux de mer avides de viande.

Sveinn était parti. Mais sa mère ne l'aimait pas plus, au contraire. Elle n'exécutait même plus le minimum de gestes à son égard, elle l'évitait de tout son être et faisait comme s'il n'existait pas. Lucifel se sentit désespéré. L'obstacle n'était plus, elle aurait du l'aimer ! Il fut tenté de se laisser mourir, mais, contre tout attente, Vigdís vint le réveiller un matin. Mécaniquement, un pâle sourire forcé sur ses lèvres, elle ânonna :

« Lucifel. On va faire un voyage. On va aller sur le continent. Juste toi et moi. »

Le garçon sentit son petit cœur froid exploser de joie. Enfin ! Enfin sa mère l'aimait ! Elle avait souri ! Et ils partaient ensemble, sans personne ! De sa vie, Lucifel n'avait jamais été aussi heureux. Jusqu'au départ pour Reykjavík où se trouvait le paquebot, il avait été exemplaire. Une crème. Jamais il n'avait été plus tendre avec les autres enfants. Jamais il n'avait été plus sincère dans ses sourires. Il se sentait neuf, lavé, paisible.


*


Vigdís était partie vérifier que leurs bagages avaient bien été chargés à bord. Elle avait payé un service pour qu'ils soient servis comme des rois, disait-elle. Ces billets avaient consommé toutes leurs économies. Sa mère lui avait donné le sien en lui demandant de monter à bord et de l'attendre sur le pont. Alors, joyeux, tenant son chapeau pour ne pas qu'il s'envole, Lucifel l'avait sagement attendue, inspirant à fond l'air marin, le parfum d'une nouvelle vie. En sentant le bateau bouger, le garçon se tourna vers la passerelle. Elle était remontée et la foule de passagers qui disaient au revoir aux gens sur le quai l'empêchait de voir si sa mère arrivait. Alors il joua des coudes pour essayer de la rejoindre, se faufilant entre les gens. Mais après trois tours de chacun des deux ponts, Lucifel ne l'avait pas trouvée. Il alla dans leur cabine ainsi que dans toutes les pièces auxquelles ils avaient accès. Elle n'était nul part. Lucifel avait peur de comprendre. Il s’effondra, roulé en boule au milieu d'une coursive, et fondit en sanglots hystériques et bruyants, appelant désespérément sa mère.

A plusieurs centaines de kilomètres de là, dans une carriole qui faisait la navette, Vigdís rentrait à Djúpivogur, entre dégoût d'elle-même et soulagement.


*


Volodia exécrait tout chez ce nouveau « frère » trouvé et imposé par ses parents. Le « pauvre petit », ils l'avaient trouvé errant sur le bord de la route de campagne qui menait à leur ferme, maigre et fatigué, comme un petit moineau après l'hiver. Il n'avait plus de souliers, portait des fripes crasseuses et malodorante et ses cheveux noirs étaient collés de boue séché, emmêlés. Volodia l'avait trouvé écœurant dès qu'il l'avait vu, en opposition avec ses parents qui l'avaient tout de suite pris en pitié et adopté. Le gosse avait perdu sa mère et parlait à peine Anglais, balbutiant à peine quelques mots compréhensibles au milieu du fatras scandinave qu'il baragouinait. A présent, il parlait mieux mais il lui restait des fautes de grammaires tenaces et ce ridicule petit accent qui lui faisait légèrement rouler les R sur le bout de la langue, prononcer bizarrement certaines voyelles et ajouter de sons de gorge partout. Le gamin disait avoir neuf ans, mais il en faisait à peine sept ou huit : il était petit et chétif, une vraie mauviette. Ses parents avaient beau le plaindre quand il racontait que sa mère l'avait abandonné dans un bateau en partance pour l'Angleterre alors que son pays d'origine était loin, très loin au Nord, en Islande, Volodia ne pouvait s'empêcher de penser qu'il y avait une très bonne raison à cet abandon.

Pendant qu'il travaillait d'arrache-pied pour aider son père et sa mère, Lucifel – c'était le nom démoniaque de cette créature – passait le plus clair de son temps à faire mine d'être occupé, allant-et-venant on ne sait où, piquant des trucs à manger et transportant quelques brindilles pour avoir l'air de travailler aussi. Tu parles... Il ne faisait que se promener alentour en se goinfrant de yaourt et de crème. Ça, on pouvait dire qu'il aimait les produits laitiers ! Il ne se nourrissait pratiquement que de ça ! Il en fallait peu à ses parents pour s'extasier devant le mioche : qu'il batte des cils, qu'il ramène une bonne note de l'école, qu'il fasse une phrase sans fautes ou qu'il sourit, ils étaient toujours invariablement en extase devant lui. Pourtant, Volodia aussi était un garçon brillant, intelligent, vaillant et tout plein d'autres qualités, mais apparemment, cela n'arrivait pas à la cheville des pitreries de môssieur. Qu'il commence seulement à se dandiner au son du gramophone et c'en était fini ! Ses parents tombaient en pâmoison devant ses trémoussements, ses œillades de biches et ses sourires de pucelle. Monsieur et Madame Overstreet étaient fascinés par ce sale gamin qui faisait tout pour entretenir cette adoration qu'ils avaient pour lui. C'est vrai qu'il avait quelque chose de différents des autres enfants de son âge, quelque chose de plus mâture, de plus énigmatique et de plus magnétique aussi. Mais Volodia refusait de se laisser duper par le miel qu'il leur proposait, suave et charmeur, il savait qu'il n'était pas franc, qu'il y avait autre chose. Ce pourquoi sa mère n'avait plus voulu de lui, assez pour l'envoyer à ses kilomètres et des kilomètres d'elle, par delà les mers.

Parfois passait dans ses étranges yeux violacés quelque chose de malsain, de pourri. Dans un rictus fugitif de ses lèvres roses. Il avait beau multiplier les chatteries, Volodia voyait ces ténèbres enfouies que le gosse s'efforçait de cacher et il repoussait systématiquement ses marques d'affection en faisant fi des reproches de ses parents, dut-il essuyer un soufflet de son père s'il dépassait les bornes en poussant Lucifel à terre dans un mouvement de dégoût épidermique. Plus il le repoussait, plus le gosse s'accrochait et redoublait d'effort pour le conquérir, lui courant littéralement après et inventant de nouveaux moyens pour se faire bien voir de lui. Mais plus Volodia le repoussait, plus il voyait régulièrement cette lueur de colère sourde, cruelle et intensément contrariée briller dans ses yeux : Lucifel n'avait pas l'habitude de l'échec et il avait horreur de ça, pour la plus grande joie du jeune homme.

Volodia ne pouvait nier qu'il était en quelque sorte attiré par la créature malingre qui partageait sa chambre – à son grand dam. C'est vrai qu'il avait quelque chose de fascinant. Mais si ses parents voyaient en lui un enfant adorable et précoce en tout, Volodia y voyait un organisme inédit, un objet de curiosité distante. Il lui arrivait de le suivre un moment et de le surveiller à la dérobée. Quand le garçon était seul, il changeait du tout au tout ; son visage semblait celui d'un autre. Oubliés les sourires de chattemite, le regard caressant et le rose aux joues : Lucifel affichait un masque de froideur inhospitalière, les lèvres serrées en une expression de dureté tendue, les yeux durs et glacials, les poings crispés. Un jour, Volodia avait chronométré et le mioche était resté plus d'un quart d'heure sans esquisser d'autre mouvement que celui de cligner des yeux. Il avait l'air d'une machine, un peu. Une fois, Volodia l'avait même surpris avec un nid d'oiseau plein d’œufs dans les mains ; au lieu de le reposer dans un arbre ou de le ramener en piaillant de joie comme tout enfant niais aurait fait, il avait lâché les œufs un par un sur le sol et avait écrasé les fœtus d'oisillons avec une lenteur calculée sous sa chaussure. Avec toujours ces yeux froids et sombres. Cette scène avait achevée de faire du garçon un être infect dans l'esprit de Volodia.

Mais ce jour-là fut marquée par une véritable tragédie. Le fils du laitier qui aidait parfois à la ferme avait été retrouvé mort, étouffé dans le gigantesque tas de paille stocké dans la grange. Il avait du glisser du grenier à foin plus en hauteur et était tombé dans ce piège vicieux, s'était enfoncé dans la paille comme dans des sables mouvants et s'était étouffé, incapable de respirer dans cet océan jaunâtre de poussière et de fétus. Le deuil avait marqué les cœurs et tout le monde était bouleversé. Jim était un chic type qui n'aurait fait de mal à une mouche. Pas comme... Sans savoir pourquoi, Volodia avait jeté un regard soupçonneux à Lucifel. Une intuition. Il fut surpris – perplexe – de voir ce dernier observer les autres du coin de l’œil, l'expression changeante. Essaierait-il de copier leur mine... ? Quand le gamin capta le regard de l'adolescent sur lui, il détourna promptement la tête et s’abîma dans la contemplation de ses souliers.

L'adolescent ne pu coincer le gosse que dans la soirée, quand tout le monde fut retourné à ses occupations. Il le trouva dans cette même grange en train de soulever la paille du bout de ses chaussures, les mains dans les poches et les cheveux ébouriffés, une croûte de sang sur le genou. Pas étonnant qu'il se casse la gueule avec des quilles aussi fines ; des brindilles ! Se faufilant derrière lui avec la discrétion et la rapidité du serpent, Volodia s'approcha et, quand l'autre perçut sa présence et esquissa un mouvement outré pour se retourner, le jeune homme le projeta à terre où il tomba à plat dos avec un hoquet de surprise. Le blond s'assit aussitôt sur le ventre du gamin, à califourchon sur lui, les mains vissées sur ses poignets pour les coincer de chaque côté de sa tête brune. Aussitôt, Lucifel se mit à couiner en se tortillant vainement :

« Mais arrêêêêêête !! Volodia, dégage, tu m'écrases ! Allez ! Vas toi t'en ! »
« On dit « vas t'en », Lucifer. »
, observa simplement Volodia en écorchant consciemment son prénom.
« Je m'en fiiiiche !! »

Le gosse secouait vivement la tête en grimaçant, les yeux étroitement clos, rugissant comme un lionceau. Volodia ne put refréner un sourire moqueur. Il approcha son visage de celui de l'Islandais, l'air un rien diabolique et sardonique, et siffla :

« Est-ce que tu as poussé Jim dans la paille, depuis le grenier à foin ? »

Il n'obtint qu'une série de gargouillis furieux et l'adolescent souleva les mains du mioche pour le secouer énergiquement avant de le laisser retomber au sol, sans douceur. Il aboya impérieusement :

« Réponds, saloperie ! »

Mais Lucifel s'obstina à piailler sa litanie :

« Arrête, arrête, arrête, arrête, arrête... ! »
« Oh, mais la ferme, bon sang ! »
siffla Volodia en lui pinçant les poignets, arrachant un cri au gamin.
« Je vais le diiire ! Lâche-moi ! » pleurnicha-t-il.

L'adolescent essaya de lui arracher ses aveux, mais le gamin s'obstina à le supplier de le laisser aller. Alors qu'il décidait de le menacer en laissant un épais filet de salive s'écouler d'entre ses lèvres, menaçant à tout moment de tomber sur le visage désormais écarlate du gosse qui s'époumonait, gueulant comme un veau, ses parents furent alertés et Volodia les entendirent appeler Lucifel. L'Anglais se déroba vivement, épargnant au petit le supplice du crachat, et ce dernier bondit sur ses jambes et fila sans demander son reste.

Lucifel monta rapidement pour se coucher après le repas mais Volodia fut retenu plus longtemps par ses parents qui lui faisaient la morale sur la façon dont il traitait son « petit frère », qu'il avait trois ans de plus et qu'il devait montrer l'exemple et faire preuve de maturité et de protection envers le petit ange. Volodia préféra obtempérer pour avoir la paix sans pour autant en penser un mot et fut autorisé à monter. Il grimpa les marches quatre à quatre et s'en fut dans la chambre. Elle était plongée dans le noir et il pouvait apercevoir la forme noire de Lucifel enroulé dans sa couverture, immobile. Il tendit l'oreille et l'entendit respirer doucement. L'adolescent hésita un instant à le réveiller, mais l'idée qu'il se remette à hurler et que ses parents rappliquent l'en détourna. Il se mit rapidement en pyjama et se coucha, maussade et amer, furieux aussi que cette énigme, dont il avait l'intime conviction d'avoir la réponse, lui échappe.

Il était en train de glisser dans le sommeil quand il entendit une voix froide cruelle, à peine un chuchotement glacial et dénué de toute culpabilité :

« Oui. »

Volodia mit quelques secondes à comprendre que c'était « Lucifer » qui avait parlé ; il l'avait toujours entendu s'exprimer avec une petite voix minaudante et mignonne à souhait, jamais de cette manière, aussi sèche et acide que son regard lorsqu'il se trouvait seul. Volodia fronça les sourcil et s'apprêter à lui demander d'un ton acerbe à quoi il acquiesçait avant de se rappeler avec horreur qu'il ne lui avait posé qu'une seule et unique question aujourd'hui...


*


Lucifel regardait le paysage nocturne défiler paresseusement sous le dirigeable par l'observatoire vitré aménagé le long d'une coursive. Les mains agrippées au grade-corps qui empêchait les voyageurs trop curieux de venir se coller aux vitres, il écoutait le ronronnement des hélices du mastodonte qui dérivait dans le ciel. En cette fin de Septembre 1940, les parents de Volodia avaient décidés de se payer un petit quelque chose pour se remonter le moral. Ce furent des billets pour le baptême de l'air d'un énorme dirigeable de croisière. Volodia pensait que tout ça était vain en temps de guerre. Lucifel s'en fichait. Après tout, il n'avait jamais rien demandé, lui, et il n'était pas responsable de la guerre. Le père Overstreet n'était pas partit combattre en raison de son âge avancé et la famille demeurait donc unie. La famille, hein... Lucifel fut interrompu dans ses pensées par Volodia qui vint se poster à côté de lui, un peu maussade malgré son impassibilité. Il lui parlait encore moins depuis « l'incident » avec Jim et Lucifel avait un peu abandonné l'idée de le rallier un jour sous sa coupe, fatigué de se débattre dans le vent. Ils restèrent silencieux, côte-à-côte, à regarder les champs plongés dans le noir. Lucifel donnait de petits coups de pieds dans la barrière métallique, machinal. Soudain, brisant l'ambiance paisible, un grand bruit d'explosion se fit entendre et le dirigeable chuta d'un coup de plusieurs mètres. Lucifel poussa un cri en tombant à la renverse et Volodia, se rattrapant de justesse, pesta, presque par réflexe :

« Mais qu'est-ce que t'as fais encore ? ! »
« Mais rien !! »
, protesta Lucifel, paniqué, agrippant ce qu'il pouvait pour se relever, tremblant.

Des cris ne tardèrent pas à fuser et parmi eux, une bombe : « Un incendie ! Au feu ! Au feu ! Le ballon d'hélium a explosé !! ». Le dirigeable piquait dangereusement du nez et commença à tomber. Dehors, on pouvait voir une furieuse lueur orange irradier de l'arrière du dirigeable. Mort de peur, Lucifel enlaça étroitement Volodia et ferma fort les yeux, le cœur battant à cent à l'heure. Il se sentait tomber, tomber, tomber... Volodia fut déséquilibré et il roulèrent jusqu'au bout du couloir, s'écrasant avec lui contre les boiseries du mur. Leur chute et la peur mêlée soulevèrent son estomac et c'est à grand peine qu'il garda sa dignité. Il ne voulait pas mourir couvert de vomi. Il ne voulait pas mourir. Le dirigeable émettait des son d'agonie sinistres, se mélangeant aux hurlements des passagers, et les lumières s'éteignirent. Le seul éclairage venait du feu infernal qui brûlait. La dernière chose que le garçon entendit fut un fracas assourdissant, juste avant de sombrer dans le noir.


*


Le 4 Octobre 1941, on cala les deux garçons dans un autobus, direction l'orphelinat. Monsieur et Madame Overstreet avaient périt dans le crash du dirigeable et ils faisaient partie des cinq survivants de l'accident. Le zeppelin s'était écrasé dans la campagne après avoir explosé en vol à cause – semblait-il – d'une maladresse d'un technicien. Volodia ne montrait aucun émotion. Quant à Lucifel, il oscillait entre ne rien ressentir et éprouver une sorte d'ennui blasé à l'idée d'avoir perdu son foyer une fois de plus, bien qu'il n'ait jamais vraiment voué de l'affection aux Overstreet. Son « frère » refusa de s'asseoir à côté de lui pendant le trajet. Ils étaient trois enfants dans le plus, plus une maigre poignets d'adultes qui devaient descendre à d'autres arrêts. Lucifel s'était assis à côté de l'autre enfant : une fillette brune nommée Alix. Elle aussi avait perdu ses parents et allait aussi à Cloverfield – le nom de leur nouvelle maison. Ils discutèrent avec animation pendant tout le trajet, se trouvant des atomes crochus. Quand le bus les déposa devant l'arrêt, Volodia fut le premier à s'engager dans le chemin qui partait de la route et qui s'enfonçait dans la forêt. Personne n'était là pour les encadrer ou les accueillir. Ils auraient pu s'en aller. Mais Lucifel et Alix suivirent leur aîné jusqu'au portail qui se profila plus loin. Il le passèrent et ici commença leur vie de pensionnaire...

Lucifel n'était pas très aimé du directeur, Homer Kaufmann. Lucifel ne l'aimait pas non plus. Il minaudait comme ça, voilant à peine son insolence sous ses paroles sucrées, mais il le méprisait. Kaufmann le lui rendait bien. Le garçon était souvent puni et frappé, parfois même à coups de bâtons. Mais il ne cessait jamais et il finit même pas affecter de prendre goût aux punitions – du moins appréciait-il vraiment qu'on le fesse. Le directeur finit pas abandonner et par décider de ne plus en faire cas et de l'ignorer. Lucifel, lui, poursuivait son bout de chemin. Il aimait graviter autour des grands. Les grands étaient mieux. Ils se moquaient un peu de lui, le mettant au défi de fumer par exemple. Il avait déjà crapoté en Islande alors il se soumit au test, toussant et crachotant, mais feignant d'être un grand fumeur, fier. Il imitait le comportement des adultes sans en saisir le sens. Il jouait un jeu dangereux, parfois avec des partenaires trop expérimentés pour lui qui, eux, ne jouaient pas. Perdre sa virginité sur un malentendu avait été douloureux. Lucifel se rappelait s'être mordu les lèvres jusqu'au sang. Cependant, malgré tout cela, il s'était fait une place.

Sa préférée parmi tous était Amity. Un lien puissant les avaient tout de suite liés malgré leur apparente différence. Ils étaient comme deux pièces d'un même puzzle, sur la même longueur d'onde. Ça avait sans doute été malsain de s'attacher aussi rapidement et aussi violemment l'un à l'autre... Quand Amity était tombée malade à son tour, alors qu'une mystérieuse épidémie sévissait dans l'orphelinat, Lucifel en avait été bouleversé, juste avant de tomber malade à son tour. Il voyait Amity mourir. Il se voyait mourir. Il ne voulait pas. Il ne pouvait pas.


[center ]*[/center]


Quand il se réveilla, le 27 Juin 1941, ils étaient seuls. Il n'y avaient plus d'adultes. Lucifel sentit un sentiment de victoire l'envahir. Ces êtres écœurants ne leur feraient plus de mal. Ils étaient guéris. Ils avaient gagné. Alors que l'euphorie gagnaient les autres, Amity demanda :

« Et que fait-on à présent ? »

Lucifel avait marqué un temps avant de sourire :

« J'ai une idée de jeu. Ça s'appelle « le Prince et la Princesse ». Je pense que ça peut être intéressant... »



Stonefox.
VESPAAAA ! COME HERE VESPA !


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MessageSujet: Re: Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance.   Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance. Icon_minitimeJeu 2 Mai - 19:26

Et c'est enfin terminé 8D //PAN
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MessageSujet: Re: Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance.   Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance. Icon_minitimeJeu 2 Mai - 23:44

Dis dis dis, j'ai le droit de te valider ❤ ?

(Non, je ne te dis pas "Bienvenue à Cloverfield", non non non.)
(Par contre, je te dis que ta fiche est juste. HIIIIH. Un plaisir à lire !)
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MessageSujet: Re: Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance.   Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance. Icon_minitimeVen 3 Mai - 0:31

Ouiiii valide-moi, Princesse ♥♥

(merciiii *_* Elle m'aura bien fait douiller la saleté xD)
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Alix V. McAndrew

Princesse du Trèfle
Alix V. McAndrew
♣ Princesse du Trèfle ♣


Rang : Princesse.
Totem : Lynx.
Messages : 218
Age : 29
Pseudo : Poppy.

Once upon a time
Âge du personnage: 13 ans.
Date d'arrivée à Cloverfield: 4 Octobre 1940

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MessageSujet: Re: Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance.   Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance. Icon_minitimeVen 3 Mai - 15:08

Par les pouvoirs qui me sont conférés Je te valiiiiide ♥

Tu veux que je te fasse le topo de la suite aussi ;D ?



Edit L ; Owi fais-moi le topo, je comprends rien à ce forum 8D
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♣ ♣



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MessageSujet: Re: Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance.   Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance. Icon_minitime

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Lucifel Sveinsson ♣ On ne guérit jamais de son enfance.

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