Not much of an Angel - FINI



 
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 Not much of an Angel - FINI

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MessageSujet: Not much of an Angel - FINI   Not much of an Angel - FINI Icon_minitimeJeu 6 Sep - 15:23

PREDEF


Angel Rosewood
Feat. Remus Lupin - Harry Potter


Not much of an Angel - FINI PA2Ok
▬ ÂGE : Quatroze ans.
▬ DATE DE NAISSANCE : 22 juin 1927.
▬ CATÉGORIE : Orphan.
▬ RANG : 5
(mais je voudrais qu'il passe assez vite au 4 en RP, cf le reste >w<).
▬ DATE D’ARRIVÉE A CLOVERFIELD : 10 mai 1941.
▬ PÉCHÉ MORTEL : Envie & Orgueil.
▬ TOTEM : Le Castor.




I am a soldier on my own, I don't know the way.
I'm riding up the heights... of shame.


Avait-il toujours été le même ? Angel Rosewood ne le savait pas vraiment. Si les récents événements — ceux qui l'avaient mené à l'orphelinat comme ceux qui s'y étaient passés — l'avaient un peu transformé, c'était plus en superficie qu'autre chose. Ou plutôt, c'était un peu comme si on l'avait retourné comme une chaussette. Ce qui avait longtemps été enfoui avait fait surface, il avait les nerfs et le cœur à vif, mais son regard sur lui-même n'avait pas tant changé, il était surtout plus ambivalent.


Il avait toujours eu cet air un peu détaché, il avait toujours été un observateur et même un indiscret, un curieux, pas seulement dans le sens intellectuel du terme. Angel n'aimait pas qu'on lui cache des choses, alors il les traquait, écoutait aux portes, glissait son regard dans les trous de serrures, simplement pour savoir. Mais il avait toujours pu se targuer d'être digne de confiance malgré tout, parce qu'il gardait tout pour lui. Angel était une fourmi qui grappillait les informations et les secrets et les entassait dans ses petits coffres à mémoire. En tout cas, c'était son fonctionnement jusqu'au jour où il vit un intérêt à les utiliser, soit le jour où, à l'orphelinat où il vivait depuis peu, des gamins prirent le pouvoir et décidèrent de l'exercer avec tyrannie. Le petit Rosewood ne pouvait pas résister à l'idée de prendre part à la compétition. À l'école, c'était une qualité. « Il a de l'ambition, c'est très bien », disait-on de lui. Mais à Cloverfield, cela lui semblait tout simplement vital. Tant qu'il le pourrait, il grimperait dans la hiérarchie, armé de toutes ses capacités, selon lui supérieures à celles de beaucoup d'orphelins lambdas. Car si lui — contrairement aux petits souverains — ne retirait aucun plaisir pervers à écraser les autres, il n'avait plus grand-chose à perdre depuis qu'il n'avait plus de famille et, quitte à se faire des ennemis, il préférait qu'ils se trouvent parmi les orphelins impuissants plutôt que chez les Aristocrates. Pas totalement suicidaire, cependant, il usait de ses découvertes avec modération et discrétion. Plus le temps passait, moins Angel avait de scrupules à dénoncer des camarades, mais il lui en restait encore assez pour ne piocher dans ses boîtes à informations compromettantes que lorsqu'il avait besoin d'un coup de pouce, et jamais encore il n'avait trahi un ami ou quelqu'un qu'il jugeait trop vulnérable. Malheureusement, comme tous les autres, le petit s'endurcissait et ses critères avec lui. Bientôt, peut-être, on pourrait dire avec raison qu'il voulait gagner à tout prix, alors qu'il avait jusque-là toujours exclu la tricherie et la cruauté.


Touche à tout et plutôt habile, il se disait qu'il ferait un excellent valet. Dans l'idéal, il aurait voulu renverser le pouvoir et instaurer un régime plus juste, mais son ambition n'allait pas de paire avec le courage et il ne pensait pas avoir les épaules pour rejoindre un groupe de résistants dans cette société tellement surveillée. Il s'était donc fixé un objectif plus réalisable et moins périlleux : servir la Princesse. Il avait parfois eu droit à des moqueries quant à son goût pour les poupées et les beaux vêtements, mais il avait prouvé qu'il avait un certain talent pour la couture, ce qui ne pouvait déplaire aux dames qui se devaient d'être présentables ou voulaient être admirées. Il exerçait aussi avec dextérité son métier de menuisier et ne manquait pas de mettre en avant sa culture acquise à la Grammar School qu'il avait fréquentée avec de se retrouver orphelin. À afficher tout son savoir dès qu'un Aristocrate se trouvait dans les parages, il savait qu'il passait pour un prétentieux, et sans doute l'était-il un peu. Selon certains, il avait effectivement tout d'un membre de la Lower Class, mais ce n'était pas flatteur dans toutes les bouches.


Dans tout ça, Angel essayait de jongler avec sa conscience, les valeurs qu'on lui avait inculquées, et son envie d'améliorer ses propres conditions de vie. Le mélange donnait un gamin un peu bancal, et pour cause. Depuis tout petit, sa mère l'avait mis sur un piédestal, tandis que son père était un vrai modeste. Angel avait donc appris de son père qu'un peu d'humilité de faisait pas de mal, mais il avait du mal à se dire en toute sincérité qu'il ne valait pas mieux que beaucoup d'autres. Hypocrite, y compris avec lui-même, il culpabilisait pourtant. C'était peut-être aussi l'âge, la quête de son identité. Toujours est-il que cette confusion n'arrangeait pas les choses et Angel se fatiguait de plus en plus vite à vouloir prendre sur lui. À fleur de peau, il pouvait avoir un besoin urgent d'aller hurler dans son oreiller ou de casser l'un de ses ouvrages de bois simplement pour se défouler, ou parce qu'il décidait qu'il était trop imparfait, il ne retenait pas toujours des mots qui dépassaient sa pensée — ou non —, il en oubliait parfois tout danger et il lui arrivait même d'y courir volontairement, décidé à tout foutre par terre. Pour faire court, Angel Rosewood était en pleine crise d'adolescence, devait faire face à une société hiérarchisée à l'image de celle des adultes mais gouvernée par des enfants malsains, et s'évertuait à chercher un sens à tout ça. Il s'essoufflait.


En dehors de ses pétages de plombs, qu'il parvenait encore au moins à dissimuler, la plupart du temps, en s'éclipsant quant il sentait la moutarde lui monter au nez, Angel apparaissait comme quelqu'un d'assez sage et réfléchi, un peu trop docile peut-être, mais ne faisant que jouer le jeu de la monarchie comme tant d'autres. Son côté pompeux se calmait radicalement lorsqu'aucun membre de l'élite n'était en vue, et il devenait plus agréable, n'étalant pas sa science à tout bout de champs pour se faire remarquer. Certains acceptaient donc de ne pas lui en tenir rigueur. S'il donnait plus facilement son avis, s'affirmait plus qu'à l'époque où il vivait avec ses deux parents omniprésents, il savait encore s'effacer et n'était pas du genre à lancer des débats ou à s'aventurer sur des terrains glissants.


I'm waiting for the call, the hand on the chest.
I'm ready for the fight... and fate.

Un simple petit questionnaire pour mieux connaître votre personnage et son sentiment sur la vie à l'orphelinat.
  • Que pensez-vous de la Royauté ? Dans un premier temps, Angel ne rêvait que d'un retour à la normale. Il s'est surpris à envier le trône de Lucifel, parce qu'il avait un faible pour la Princesse Amity, mais pas très sérieusement. Lorsqu'elle a été remplacée par Alix, sa jalousie envers Lucifel s'est un peu atténuée, et même s'il n'a en fait aucun sentiment particulier pour ces deux-là, il fait avec et aimerait bien les servir, pour les avantages que cela implique.
  • Que pensez-vous de l'Aristocratie ? Il veut donc rejoindre leurs rangs, en sachant que l'ascension peut être longue et qu'il ne sera pas Comte ou Duc avant un moment, s'il finit par l'être. En tout cas, il vise pour le moment la place de Valet royal et tente de s'attirer la sympathie des Aristocrates en général. Il en admire ou apprécie réellement quelques-uns, d'autres le laissent indifférent, mais il n'en déteste a priori aucun — il ne les connait pas vraiment non plus.
  • Quel est votre sentiments sur Le Sycophante et les Remords ? Comme tous les autres, il en a peur. Il fait tout pour ne pas les contrarier et s'attirer leurs foudres. Au quotidien, il les évite au maximum et se contente d'afficher sa docilité et sa bonne volonté lorsqu'ils ne sont pas loin. Il s'intéresse cependant à la course aux clés même si cela implique de faire face au Sycophante, en grande partie pour prouver sa valeur aux classes supérieures.
  • Quel est l'investissement de votre personnage dans la course aux privilèges ? C'est bien la seule chose qui le fait tenir dans cet environnement hostile. S'il a parfois l'impression qu'il ferait mieux d'abandonner et de se laisser mourir tout de suite, il passe la majeure partie de son temps à rêver de son ascension et à réfléchir aux meilleurs moyens d'y arriver.


The sound of iron shots is stuck in my head.
The thunder of the drums dictates the rhythm of the falls, the number of deaths...


Ethel Rosewood était désespérée. Elle erra plusieurs heures dans Luton, ignorant les regards des passants qui s'offusquaient de son aspect négligé, avec son teint blafard et sa mine abattue, et ses pas la menèrent au Wardown Park. C'était un dimanche après-midi ensoleillé et elle y croisa des familles, des enfants qui couraient entre les arbres et riaient à lui faire exploser le cœur. Lorsqu'elle s'arrêta enfin, au milieu du pont qui enjambait la rivière, elle envisagea un instant de s'y jeter.

Deux fois. Deux fois elle avait porté un enfant pendant des mois difficiles, douloureux, mais tellement porteurs d'espoir et de joies à venir... Et son ventre était toujours désespérément vide. Et le couffin tendrement choisi avec George, et la chaise de bois qu'il avait fabriquée avec tant d'amour, tout était résolument vide. Par-dessus tout, sa vie l'était.

Chez les Breese — c'était son nom de jeune fille —, on était habitué aux familles nombreuses. Ethel avait elle-même trois sœurs et deux frères, qui tous avaient déjà entre deux et cinq enfants. Elle s'était mariée la dernière, mais cela faisait tout de même trois ans. Elle n'avait réussi à tomber enceinte que deux fois et avait perdu son premier enfant au bout de six mois de grossesse, le second au bout de cinq. Allait-ce aller en régressant ?

Elle regarda l'eau qui s'écoulait joyeusement, comme pour se moquer d'elle et de son incapacité à donner la vie, comme pour la narguer. C'était ridicule, décida Ethel, elle avait probablement pied à cet endroit et, même si elle ne savait pas nager, elle ne coulerait pas si facilement. Apparemment, se tuer n'était pas chose facile. Sans doute était-il encore trop tôt, se dit-elle alors qu'elle quittait le parc, reprenait le chemin de la maison. Elle laisserait encore une chance à sa vie pour lui donner un enfant, et si elle le lui refusait encore, elle y mettrait fin. Sa famille très pieuse aurait été scandalisée par de telles pensées, mais si sa première fausse couche avait raccroché Ethel à sa foi, la seconde l'en avait arrachée. Si Dieu existait, il était clair qu'il n'était pas juste.


Voilà ce que rumina la jeune femme en mal d'enfant jusqu'au beau jour où, huit mois et dix-sept jours plus tard, son docteur lui annonça qu'elle était enceinte. Elle n'avait pas ressenti les mêmes symptômes que les deux premières fois. Elle avait bien songé à une éventuelle grossesse mais s'était dit qu'il était impossible que cela se passe aussi bien, qu'il devait s'agir d'une petite maladie sans gravité mais persistante. Mais quelle maladie !

À l'annonce de la nouvelle, George Rosewood, menuisier comme son père et son grand-père, prit sa femme dans ses bras et la couvrit de baisers, de même que ce ventre à peine arrondi où grandissait de nouveau l'Espoir. Ils n’annoncèrent pas tout de suite la nouvelle à leurs familles et amis, de peur que cela leur porte malheur, et laissèrent fermée à clé la porte de la future chambre d'enfant. Il fallait y croire sans se faire d'illusion, un dosage bien difficile que George s'efforçait de préserver. Ethel oscillait entre un trop plein d'optimisme qu'il ne pouvait pas lui reprocher et un pessimisme qu'il ne comprenait que trop bien. Des cauchemars dans lesquels elle se voyait accoucher d'un mort-né la hantaient. Son ventre s'arrondissait pourtant, tranquillement, normalement, et tout leur entourage fut bientôt au courant. Des idées de prénoms fusaient, des vieux vêtements changeaient de mains, comme ça avait déjà été le cas par deux fois — ils les avaient à chaque fois rendus pour ne pas être hantés par les fantômes de leurs enfants et refusaient tous les prénoms proposés, pour les avoir déjà entendus. Tout ce beau monde était soit très insouciant, à ne pas réaliser qu'une troisième fausse couche était prévisible, soit particulièrement bienveillant, à éviter de le faire remarquer. Plus le moment approchait, plus Ethel et George y croyaient. Ils finirent par ouvrir la chambre poussiéreuse qu'Ethel n'eut le droit de redécouvrir qu'après un ménage minutieux et la confection d'une commode par George. Il l'éloignait de tout ce qui pouvait être toxique, même les pots d'échappement des Vauxhall qu'ils croisaient au centre ville, même la fumée de cigarette du grand-père Henry et de la tante Bertha, même la sciure de bois qui voletait dans son atelier, et même la poussière. De l'autre côte, la mère d'Ethel la tannait pour qu'elle reprenne de chaque plat qu'elle lui apportait pour être sûre qu'elle mange bien, et elle fut si bien nourrie que son ventre ne fut pas le seul à s'arrondir. Lorsque le jour vint enfin — seulement une dizaine de jours avant la date prévue —, le petit garçon qu'elle mit au monde était déjà bien dodu, chevelu de bouclettes d'un blond presque blanc. Parce qu'il avait des airs angéliques, parce qu'il était un enfant presque miraculeux, et parce qu'Ethel en avait fini d'en vouloir à Dieu, elle déclara en le prenant dans ses bras pour la première fois qu'il s'appellerait :


— Angel George Rosewood.


Et George n'eut pas la moindre objection.



*


Angel avait six ans et était amoureux. Dorothy en avait sept, était belle comme une poupée et plus adorable que tous les anges, avec ses longs cheveux noirs et ses yeux noisettes qui tiraient sur le doré. Comme George fabriquait régulièrement des jouets en bois pour son fils unique, qu'il gâtait avec ses moyens, le petit lui avait demandé de l'aider à fabriquer une poupée pour sa dulcinée. Finalement, le projet évolua, et c'est toute une maison meublée que construisit George, se renseignant à côté sur la fabrication de poupées. Entre la maison, les tentatives ratées et son travail — qui lui prenait tout de même la majeure partie de son temps —, il leur fallut plus de six mois pour achever l'ensemble. Bien qu'impatient, Angel trouva bonne l'idée de son père : fignoler les détails et ne lui offrir que pour son anniversaire, deux mois plus tard.

Ce cadeau fit sans doute de l'ombre à celui des parents de Dorothy, mais ils n'en étaient pas moins ravis, tout autant qu'elle. Ils encouragèrent George à commercialiser maisons et meubles, et pourquoi pas même des poupées, même si son premier ouvrage était encore imparfait. Soutenu également par sa femme et son fils, et malgré le scepticisme de ses propres parents, Geroge finit par décider de se lancer. Ethel ferait les vêtements, les habillerait, les coifferait... George transforma une partie de son atelier en boutique et améliora sa technique auprès d'un célèbre fabriquant de poupées italien. Ethel retrouva pour quelques temps un poste de dactylographe, le métier qu'elle exerçait avant son mariage, pour permettre à George de suivre sa « formation ». Ils furent qualifiés d'excentriques par bon nombre de voisins, certains amis et membres de leurs familles, mais rien n’entachait leur enthousiasme et leur volonté, pas même les mois financièrement rudes et la perspective d'un échec.

Et c'est ainsi que naquit le deuxième bébé de la famille : une boutique coquettement décorée, à l'enseigne rose et bleu pastel qui affichait : Rosewood Angels. On y trouvait majoritairement des poupées — de chiffon, de cire, de papier mâché, au corps de bois ou de tissu rembourré, et de toutes les tailles —, mais aussi des meubles et des maisons, avec possibilité de passer commande. Divers jouets en bois, petites voitures, pantins articulés, bouliers, y avaient également leur place. Dans la ville prospère de Luton, ce petit commerce rencontra rapidement un certain succès. Le plus difficile, se disaient les Rosewood, serait de garder leur clientèle et de surmonter la crise.

Alors qu'on ne cessait de leur mettre des annonces de maisons et d'appartements sous le nez, Ethel, qui avait d'abord catégoriquement refusé de déménager parce qu'elle ne voulait pas changer Angel d'école, le priver de sa petite Dorothy, leur voisine, et surtout parce qu'elle voulait mettre un maximum d'argent de côté pour pouvoir l'envoyer dans la meilleure école possible — il avait la capacité, assurait-elle, de faire de grandes études —, commençait à se poser la question. Une maison plus grande, une chambre en plus, pour y accueillir un deuxième enfant, et puis peut-être trois... George aussi aurait bien voulu agrandir leur famille, lui qui se préoccupait moins des écoles à payer puisqu'il pensait qu'Angel reprendrait l'affaire familiale après avoir appris sur le tas. Effectivement, Angel montrait un intérêt certain pour les créations de ses parents, qu'il s'agisse du choix des tissus et de la couture qu'il apprenait avec sa mère, ou le travail du bois auquel son père l'initiait. Mais quoi qu'il en soit, Ethel voulait qu'il étudie parmi les meilleurs, qu'il soit l'un des leurs. George et elle décidèrent donc d'attendre, de faire un deuxième enfant qui partagerait la chambre d'Angel qui, lui, partirait probablement en internat dès ses onze ans. Il n'y avait pas d'urgence et, de toute façon, en cette période, leur maison se serait vendue une bouchée de pain.



*


Angel avait neuf ans lorsque sa mère lui annonça qu'il aurait bientôt une petite sœur. Une petite sœur, avait-elle affirmé. Elle le sentait. Barbara, Ruth ou Joan, les parents hésitaient. Mais cela ne leur empêcha pas de créer un nouveau modèle de poupée, plus perfectionné, qu'ils appelèrent Betty et décidèrent de mettre en vente le jour de sa naissance. Ils en avaient prévu seulement une dizaine, car elle coûtait cher à la fabrication — en porcelaine et temps de travail. Leur fille aurait bien sûr la première, la plus réussie, qui trônait déjà sur leur commode et à laquelle Angel n'avait pas le droit de toucher. Mais tout ne se passa pas comme prévu, les vieilles terreurs d'Ethel revinrent, cette fois-ci avec raison. Le septième mois fut particulièrement pénible, elle se surprenait à vouloir que sa fille disparaisse une bonne fois pour toute, qu'elle n'ait jamais été là. Elle aurait dû se contenter d'Angel. Après tout, elle avait passé un pacte avec la vie, et elle la défiait en décidant d'avoir un autre enfant. Angel n'y comprenait rien. L'heureuse nouvelle devenait promesse d'une catastrophe, les beaux projets étaient laissés en plan, l'inquiétude gagnait tout le monde autour de lui, et personne ne prenait le temps de lui expliquer quoi que ce soit. Comment croire à un « tout va bien » alors qu'il lisait la plus grande détresse dans les yeux de son père et que le médecin ne quittait plus le chevet de sa mère ? Il ne fallait pas le prendre pour le dernier des imbéciles.

Mais il avait l'habitude qu'on le prenne pour une petite marionnette que l'on pouvait manipuler quand on en avait envie, pour la reposer dans un coin lorsque l'on n'en avait plus besoin. Il avait toujours laissé ses parents décider de tout, jusqu'à ses goûts et ses envies. C'était sa façon à lui d'appréhender la vie : passivement. Pourtant, il grandissait, il changeait, et cela le fatiguait. Mais ce n'était pas le moment pour une crise d'adolescence prématurée. Il ne savait que deux choses sur l'état de sa mère : qu'elle souffrait et que ses jours étaient en danger, comme il l'avait entendu à travers la porte fermée de la cuisine. Puisqu'on ne lui disait rien, il avait décidé d'être indiscret, mais les informations qu'il avait glanées ne le soulagèrent pas, finalement.

Elles s'avérèrent justes. Angel le savait déjà lorsqu'il fut invité chez ses cousins pour la nuit. Il avait croisé le médecin et une infirmière sur le pas de la porte alors que son oncle faisait des adieux anormalement longs à Ethel. Bien entendu, il avait peur qu'ils soient définitifs, avait aussitôt pensé le petit homme. Angel avait décidé d'agir comme s'il ne se doutait de rien, pour la rassurer, mais rien d'autre n'occupait ses pensées. Une petite voix résonnait dans un coin de sa tête, comme le refrain d'une chanson désagréable dont on n'arrive pas à se débarrasser : elle va mourir. Ethel aussi le savait, de même qu'elle savait que sa fille ne serait pas sauvée.



*


Un soir de janvier 1938, Angel jouait au jeu des sept familles avec ses cousins.


— Dans la famille Bacon, je voudrais la fille, lui demanda Maggie avec un sourire triomphant.


Il la lui tendit en bougonnant. Ils étaient ex-aequo. Il détourna la tête en soupirant, se cacha le visage dans les mains. Angel n'avait jamais été très bon perdant, mais de là à fondre en larmes... Déconcertés, ses cousins se jetèrent des regards interrogatifs avant de poser les yeux sur lui.


— Angel ? risqua Maggie, mais il se contenta de lâcher ses cartes et de se recroqueviller plus encore.


Quelle idée, le jeu des sept familles. Dans la famille Rosewood, il manquait deux cartes. Il avait perdu.



*


Au sommet de son caisse de jouets, la poupée Betty le regardait. Angel et George déménageaient à Aylesbury, où George reprenait son métier de menuisier. Il avait revendu la boutique et la maison et inscrit Angel à la Grammar School de la ville, comme l'avait voulu Ethel. Angel quitta la ville, ses cousins, ses amis, avec une pointe de regret mais plus encore d'excitation. La vie lui offrait un nouveau départ, une chance de s'affirmer, de faire ses preuves. Avant la rentrée, il se fixa comme objectif de lire le plus de classiques possibles, même si le plus de pavés possibles en trois semaines s'éleva à trois et demi. Il continuait aussi de coudre des vêtements pour les poupées qu'il avait gardées et incitait son père à se remettre aux maisons miniatures. Il espérait le voir ouvrir une nouvelle boutique, se remettre à la confection de poupées, mais cela lui causait sans doute une douleur encore trop vive. Au lieu de ça, il noyait son chagrin dans le travail et la fumée de cigarettes. Alors Angel se contentait de l'aider à l'atelier. Les journées d'école étaient certes fatigantes et il avait souvent droit à son lot de remarques condescendantes de la part de camarades plus riches et mieux éduqués, mais elles n'en étaient pas moins exaltantes. De Shakespeare aux problèmes mathématiques, tout l'intéressait, il n'en ratait pas une miette. George aussi finit par retrouver un semblant de joie de vivre, ou au moins l'air de vivre parmi les vivants.


S'il n'y avait pas eu la guerre, tout aurait pu bien se terminer. Mais comme le hasard est une histoire dont on ne connait pas la fin, on ne peut jamais vraiment prévoir. George avait prévenu son fils : la guerre avait éclaté, il pouvait être appelé, mais si c'était le cas Angel irait chez l'une de ses tantes. Il croyait avoir tout prévu. Il n'avait pas songé aux bombardements qui détruiraient une partie de Luton, comprenant trois des habitations des Rosewood et des Breese. Il n'avait pas pensé au fait que son frère et ceux d'Ethel seraient également appelés, que les femmes devraient gérer toutes seules, au milieu de ruines, leurs nombreux enfants. Il n'aurait surtout pas cru se retrouver si vite au cœur d'une bataille, en mars 1941.

Ce fut pourtant ce qui arriva, et aussi bienveillants soient-ils, les tantes et grands-parents d'Angel avaient suffisamment de problèmes à gérer et de bouches à nourrir. Ils acceptèrent d'abord de prendre Angel à tour de rôle, en se disant que ça ne durerait pas, mais lorsqu'une missive leur annonça que George Frank Rosewood était mort au combat, il fallut envisager une solution plus définitive. Après le retour du corps qu'Angel ne fut pas autorisé à voir, ce qui ne lui permit que d'imaginer le pire concernant les dégâts infligés à son père, l'enterrement et la période troublée du deuil, Angel entendit parler de Cloverfield pour la première fois.


— C'est un orphelinat, mais on m'en a dit du bien, assurait Bertha.
— Oui, enfin, comme tous les autres, il sera bientôt surpeuplé, objectait l'oncle Bill.
— On a déjà dû se rassembler sous deux toits, ça ne pourra pas durer ! Ce n'est pas loin, on ira le voir, et quand ce sera calmé...
— Il sera toujours orphelin, ou adulte, coupait Bill avec raison.

Comme à son habitude, Angel avait écouté à la porte les adultes décider de son sort. Un orphelinat ? Il pouvait dire adieu à l'école. C'était là son plus gros soucis. Il avait beau avoir de l'affection pour sa famille, il était vrai qu'ils se marchaient sur les pieds, tous empilés dans de petites maisons, et n'aimait pas avoir le sentiment d'être un fardeau. Et puis, il était encore assez naïf pour croire qu'il les verrait malgré tout. Alors, vraiment, ce qui l'inquiétait le plus était son avenir professionnel. Il voulait un métier important, de la reconnaissance, celle qu'il méritait. Il aimait les défis, la compétition plutôt saine de son école, mais demander à un orphelin de se hisser dans les hauts rangs relevait du fantasme. Dans la famille Rosewood, il n'y avait plus qu'une carte, c'était perdu d'avance. Un nouveau départ lui était de nouveau promis, mais pour quelle destination ? Une petite voix lui souffla « l'Enfer », mais il pensa qu'elle exagérait.



*


Angel venait d'avoir quatorze ans et il avait pu passer le dimanche ensoleillé de son anniversaire avec sa famille. Il n'avait pas terminé l'année scolaire et, puisque l'école n'était plus obligatoire à son âge, il pouvait faire une croix dessus. On lui apprendrait sûrement un métier manuel et, naturellement, il choisirait la menuiserie. C'était tellement décevant. Pour le réconforter, son oncle Thomas lui expliqua que son père lui avait laissé un héritage — la maison — et qu'il pourrait en faire quelque chose lorsqu'il le toucherait. Jusque là, Thomas en était le gardien, ce qui ne rassurait guère Angel : son oncle était bien connu pour ses pratiques douteuses lorsqu'il était question d'argent. Il n'exprima pas sa méfiance mais lui fit amèrement remarquer qu'un héritage ne lui ramènerait pas sa famille, histoire de le faire taire avec sa sale manie de tout ramener aux comptes en banque. Angel avait d'autres préoccupations, alors que ses compères tombaient comme des mouches, que lui-même avait dû faire deux séjours à l'infirmerie et ne se sentait toujours pas bien. On parlait d'épidémie, mais aussi d'empoisonnement. Angel ne savait pas quelle rumeur croire tant il y en avait.


Quelques jours plus tard, pourtant, les choses prirent une toute autre tournure. Les adultes avaient disparu. Il n'y avait aucun indice, aucune explication possible. Leurs affaires étaient là, comme s'ils s'étaient arrêtés au beau milieu de leurs activités. Certains orphelins tournèrent vite la situation à leur avantage, et avant qu'Angel n'ait eu le temps de comprendre quoi que ce soit, Lucifel Sveinnson et Amity Prowse furent « élus » Prince et Princesse du Trèfle. Si Angel avait un faible pour Amity, son semblant de sympathie pour Lucifel avait toujours été parfaitement hypocrite — peut-être en était-il jaloux. La disparition des adultes l'inquiétait, et même s'il était comme les autres gagné par un certain sentiment de liberté, il savait que la sauce retomberait rapidement. Il faudrait bien faire quelque chose, quelqu'un allait sûrement finir par s'en rendre compte et venir les encadrer. Le problème, c'était qu'aucun enfant, parmi les quelques uns à avoir tenté, n'avait réussi à sortir de l'enceinte de l'orphelinat. Pour couronner le tout, les pseudos monarques montrèrent vite leur véritable visage, celui de la perversité, de la cruauté pas tout à fait enfantine. Et Angel se retrouva catalogué de « rang 7 », fut sommé de choisir un animal totem en guise de signature — comme s'il ne savait pas écrire, franchement — et un travail. Il fit aussitôt valoir ses compétences de menuisier et, comme il faisait partie des meilleurs, fut promu au rang 5. Là, il put réaliser lui-même son totem de bois à l'effigie d'un castor ainsi que ceux de nombreux autres orphelins, y compris celui d'Amity Prowse, qu'il soigna tout particulièrement.

Mais la fierté qu'il retirait de son labeur était insuffisante, parce qu'il n'était qu'un rang 5, et il ne pouvait même pas adresser la parole à sa princesse, l'impressionner de tout son savoir-faire, de toutes ses connaissances. Il aurait fait un bon prince, et même un bon roi. Pourquoi n'y en aurait-il pas, de toute façon ? Motivé par une ambition de plus en plus dévorante et la compétition qui s'était rapidement mise en place parmi les orphelins, il se mit en tête de gravir les échelons. Si Amity n'avait d'yeux que pour Lucifel, Angel laissait traîner les siens partout et espérait bien s'en servir pour rejoindre l'Aristocratie. Cette curiosité était cependant à double tranchant : il ne tarda pas à réaliser que les rumeurs concernant des monstres qui erraient dans la bâtisse à la recherche d'enfants à punir étaient fondées. Si dans un premier temps cette découverte calma ses ardeurs, il comprit en voyant le Sycophante murmurer à l'oreille du Prince qu'il n'y avait plus qu'une chose à faire : entrer dans leurs bonnes grâces à tous, petites altesses et affreux monstres, faire d'une pierre deux coups. Ainsi, outre les privilèges de l'Aristocratie, il échapperait à la terreur que faisaient régner ces créatures de cauchemars.

Avant qu'un énième décès ne vienne bouleverser l'ordre de sa vie, Angel avait pris la décision d'offrir Betty à Amity, en espérant qu'elle se rendre compte du symbole que cela représentait. Pendant son temps libre, il récupérait des chutes de tissus pour coudre de nouvelles robes dignes d'une princesse à la poupée et lui fabriqua une chaise à bascule. Mais avant qu'il n'ait eu le temps de la lui offrir, la mort d'Amity fut annoncée par le Prince. Dans la famille Rosewood, il n'y avait plus qu'une carte ; dans la famille Prowse, zéro. La Reine de Trèfle avait rendu l'âme, il se demandait maintenant s'il ne trouverait jamais une Reine de Cœur. Tout ceux qu'il aimait avaient une fâcheuse tendance à disparaître.



Kenny


Not much of an Angel - FINI All_ma10
▬ Âge : 20 ans.
▬ Sexe : Une.
▬ Double compte ? Pas encore 8D
▬ Comment avez vous connu le forum ? À cause de l'autre là, Nynh.
▬ Qu'en pensez vous ? Voyez vous des améliorations à apporter ? Ben oui ça craint franchement. À mon avis la seule solution c'est de fermer le forum.
▬ Autre chose ? Pouet.
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Albert Gillespie

Lucifel's Bitch
Albert Gillespie
♣ Lucifel's Bitch ♣


Rang : Baron
Totem : Merle
Messages : 381
Age : 30
Pseudo : Nynh

Once upon a time
Âge du personnage: 15 ans.
Date d'arrivée à Cloverfield: 12 mai 1934.

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MessageSujet: Re: Not much of an Angel - FINI   Not much of an Angel - FINI Icon_minitimeJeu 6 Sep - 18:10

Kenny ! ♥ Alors je ne vois rien à redire à ta fiche si ce n'est que...

Tu es validé(e)~

Si le cœur t'en dis, tu peux poster une fiche de relations pour Angel ici, demander un rp et poster la réaction d'Angel à l'intrigue en cours en attendant qu'elle ne puisse véritablement commencer ♥ N'oublie pas d'envoyer la (les) bêtises/hontes d'Angel au Sycophante~ !
N'oublie pas de poster les formulaires correspondants dans le bottin des avatar, les postes à pourvoir et la liste des totems pour réserver ton avatar, ton travail à Cloverfield et ton totem !

Bon jeu ♥
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MessageSujet: Re: Not much of an Angel - FINI   Not much of an Angel - FINI Icon_minitimeJeu 6 Sep - 18:25

Thanks :3
J'y réfléchis encore un peu pour les bêtises hein ;w;
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Albert Gillespie

Lucifel's Bitch
Albert Gillespie
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MessageSujet: Re: Not much of an Angel - FINI   Not much of an Angel - FINI Icon_minitimeJeu 6 Sep - 18:27

Ne t'en fais pas, tu as un peu de temps quand même hein !
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MessageSujet: Re: Not much of an Angel - FINI   Not much of an Angel - FINI Icon_minitime

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